Beschreibung:

ENCRE SUR PAPIER, 1963 Encre sur papier marouflé sur toile Signée et datée en bas à droite 64,5 x 51,5 cm (251/4 x 201/4 in.) L'authenticité de cette oeuvre nous a été aimablement confirmée par Monsieur Pierre Encrevé Cette oeuvre sera incluse dans le Catalogue Raisonné des peintures sur papier de Soulages, réalisé par Monsieur Pierre Encrevé, actuellement en préparation Provenance: - Galerie Delorme, Paris, 1998 - Collection particulière, Le Havre Cette Encre de 1963 appartient au grand ensemble des oeuvres sur papier de Pierre Soulages Elle se distingue cependant par l'utilisation de l'encre, plus rare que celle de la peinture, et caractéristique de la période 1960-1966. Loin de n'être qu'un travail préparatoire pour ses toiles, l'oeuvre sur papier de Soulages constitue une oeuvre en soi, et l'artiste s'est toujours refusé à établir une hiérarchie entre oeuvres sur toile et oeuvres sur papier. C'est sur papier que se font les premiers travaux de Soulages avec le brou de noix, en 1947-48, qui identifient son style et le font connaître. Parce qu'il ne nécessite pas de préparation et que la peinture s'y fixe rapidement, le papier impose un rythme rapide et une grande proximité au support. C'est une peinture plus intime, presque charnelle. Comme l'écrit le spécialiste Pierre Encrevé, le papier chez Soulages "ne fonctionne jamais comme un lieu d'esquisses (...), mais comme un territoire propre de création1". Il y a avec le papier une "liberté d'expérimentation" qui permet, souvent, une anticipation des recherches qui seront menées ensuite sur la toile. Ainsi, l'utilisation de l'encre et le procédé d'application dans cette oeuvre de 1963 portent les prémisses d'une rupture. Tous les critiques s'accordent en effet à voir en 1963 une transition dans l'oeuvre de Soulages - Jean Cassou parle d'un "nouveau tournant2". L'artiste travaillait depuis plusieurs années la densité de la matière picturale, avec notamment la technique du raclage: peinture épaisse déposée et "déplacée", forme massive, tracés obtenus au racloir... L'année 1963, début de ce que Pierre Encrevé appellera la "jeunesse du monochrome", voit apparaître les grands aplats de couleur noire. Les toiles montrent désormais de larges nappes d'une peinture sombre, plus fluide et étendue à la brosse. Dans les peintures sur papier, dès 1960, la peinture gagne en fluidité, se mêle au grain du papier, et joue en transparence là où les grandes toiles jouaient davantage en matière et en densité. L'encre permet de multiplier les effets de transparence, très sensibles dans cette Encre de 1963 et qu'on retrouvera dans les huiles sur toile de 1964-1965. "Dans la centaine de toiles peintes entre l'automne 63 et la fin de 1967, l'évolution de la peinture de Soulages se manifeste de façon évidente sur quelques points essentiels: la fluidité beaucoup plus grande de la peinture; le traitement des noirs par grands aplats; la brève réapparition des noirs sur fond blanc non peint3". Cette Encre sur papier de 1963 porte déjà ces évolutions: l'encre y est fluide, graduellement transparente; le grain brut du papier se révèle par contraste, en bandes successives. La surface est travaillée en largeur, annonçant les grands formats qui suivront. Le mouvement horizontal subtilement tacheté a quelque chose de musical: il porte une résonance à la fois sombre et claire qui n'est pas sans invoquer le jazz d'un Coltrane, affectionné de Soulages. "La seule répétition des mouvements de brosse dessine et révèle ce qui était perdu, et éclaire le reste"(Jean Grenier, 1959). Judith Souriau 1 Pierre Encrevé, Soulages, 90 peintures sur papier, Paris, Gallimard, 2007, p.6 2 Jean Cassou, "Evolution de l'art de Soulages", Art international VIII/7, Lugano, septembre 1964 3 Pierre Encrevé, Catalogue Raisonné Soulages, l'Oeuvre complet. Peintures, volume II: 1959-1978, Paris, Seuil, 1995