Beschreibung:

ARAGON (Louis). Lettre autographe signée « L. » à Denise Kahn. Paris, « le mercredi ».1 p. 3/4, en-tête imprimé « Bureau de recherches surréalistes [...]. Organe mensuel : La révolution surréaliste ». SUPERBE LETTRE. « OU ETES VOUS, DENISE, ET TOUT LE SILENCE, JE NE SAIS PLUS COMMENT ON PARLE A CE QU'ON AIME, SI JE L'AI JAMAIS SU. Tous les jours mille fausses raisons de ne pas vous écrire, surtout une grande humeur noire, et une vie absurde. Tout se passe au plus mal, imaginez-vous. Aujourd'hui, l'espèce d'éclair, en attendant une plus profonde nuit, qui me permet de vous écrire, c'est la connaissance que je viens de faire d'une jeune homme qui vient d'arriver à Paris il y a 4 jours, qui a écrit à ANDRE [BRETON] sitôt son livre lu par hasard : étrangement ignorant, il dessine des portraits singuliers à toute allure, sans fatigue. Et à voir un tel personnage, si pur de ces affreuses préoccupations amassées en sept ans, ou cela fait bien sept ans, JE REPRENDS CONSCIENCE DE TOUT CE QUI S'EST OBSCURCI EN MOI, DE TOUT CE QUI S'EFFACE. ALORS JE VOUS ECRIS. À VOUS QUE RIEN N'EFFACE. À vous qui êtes réellement dans la pièce d'où je vous écris, vous promenant, derrière moi. Vous savez que je ne peux écrire quand on me regarde. NE ME REGARDEZ PAS, DENISE, OU J'INTERROMPS CETTE LETTRE. AINSI VOUS ETES EN MOI LA PLUS GRANDE ENNEMIE DE VOUS-MEME, CAR JE NE PEUX PLUS VOUS PARLER DES QUE JE PENSE A VOUS, JE NE VEUX PLUS QUE VOUS PENSER, PUISQU'ENFIN C'EST TOUT CE QUI M'EST DONNE AU MONDE. Tout au plus mal, oui. L'argent, le temps, Doucet [le grand couturier, collectionneur et mécène Jacques Doucet], mes amis, moi-même, les journaux, de drôles de rêves ; J'AIME POURTANT BIEN DEUX OU TROIS PERSONNES, ET CHIRICO. Mais voilà : il y a des moments où les gens sont comme des fumées, et la flamme disparaît sous son fantôme. Aujourd'hui il fait un temps tout spectral. Dans la rue j'ai reconnu au loin votre écharpe blanche mais ce n'était pas vous qui la portiez. JE ME SUIS VU DANS UN MIROIR VIEILLI, VIEILLI. VOILA. IL Y A DES JOURNEES ENTIERES OU TOUT EST MORTEL ET GLISSANT. Hier soir Simone [sœur de Denise Kahn et première épouse d'André Breton] avait près de 40, angine. Je ne sais pas, ce matin. Noll [l'écrivain, journaliste et galeriste surréaliste MARCEL NOLL] m'a écrit un mot terrible auquel je ne sais comment répondre, il faudrait faire l'optimiste. J'y suis bizarrement préparé. Ne savez-vous rien de Maxime [l'écrivain surréaliste MAXIME ALEXANDRE] ? J'ai vu son sinistre crétin de De Fages que j'ai secoué pour cette histoire de montre à laquelle je ne puis rien (le Mont-de-piété ne donne pas de renseignements, il y a opposition du père) etc., mais êtes-vous au courant de l'affaire ? Si tout s'arrange, j'aimerais le savoir. MAIS VOUS ET MOI, DENISE, VOUS ET MOI ? DROLE, DROLE D'HISTOIRE AUSSI, OU PASSE UN JOUR A ECLIPSES, QUE JE SUBIS MAL, TOUJOURS PAREIL, TOUJOURS AVEC CES YEUX FIXES, CETTE IMAGE... » JOINT, 3 pièces : BUTOR (Michel). L'Ajourée. Vitry et Gaillard, s.n., 1986. Manuscrit autographe signé, relié en un volume de format 57 x 61 mm, en veau. Exemplaire unique justifié par l'auteur. Reliure ornée d'une composition originale signée de Julius BALTAZAR. — FRERON (Stanislas Louis Marie). Lettre autographe signée. Marseille, 23 frimaire an II [13 décembre 1793]. « ... Marseille est tranquille à présent... Nous partons tous pour l'armée sous Toulon. L'attaque générale aura lieu après-demain : tout est disposé... » — GHIKA (Georges). 5 lettres autographes signées de son surnom « Gilles » (gare de Zlătunoaia au nord-est de la Roumanie) et 4 manuscrits poétiques autographes (1932-1934 et s.d.). Sur Denise Kahn, voir ci-dessus le n° 84.