Beschreibung:

Femme debout tenant deux enfants, 1901 Fusain sur papier, signé en haut à droite 31 x 22 cm - 12 1/4 x 8 5/8 in. PROVENANCE Collection madame Pierre de Saint-Fucien Puis par descendance au propriétaire actuel, vers 1970Collection privée, France BIBLIOGRAPHIE C. Zervos, Pablo Picasso Supplément aux années 1892-1902, Editions Cahiers d'Art, Paris, 1969, vol. 21, n°278 p.105 Picasso visite à plusieurs reprises à la fin de l'été 1901 la prison pour femmes de Saint-Lazare. Il y observe et croque d'anciennes prostituées et leurs enfants. La silhouette maternelle de notre dessin pourrait correspondre aux portraits qu'il y faisait. L'artiste dessine avec des traits épais, rapides et vifs une mère entourée de ses deux enfants. Les trois personnages s'imbriquent. Le corps de la mère, tout en obliques, domine la composition, ce qui donne une dimension sculpturale à l'ensemble. Elle entoure de ses bras, ses enfants, lovés contre elle, les protégeant ainsi d'un monde extérieur qui nous est invisible mais qui semble menaçant. Le visage de la mère est stylisé quand ceux des enfants sont cachés au regard du spectateur. Il n'identifie pas ses modèles mais crée un nouveau type misérabiliste de maternité. Cette oeuvre en quelques traits précis voit donc naître la Période Bleue de Picasso, période qui révèle l'immense talent de l'artiste et mise en valeur par Ambroise Vollard lui-même lors d'une rétrospective en 1910. PABLO PICASSO Né en 1881 en Andalousie et mort en 1973 à Mougins, Pablo Picasso est une figure emblématique et même devenue mythique de l'art moderne. Artiste prodige et pro­digue, il a traversé le XXe siècle en appor­tant sa touche personnelle et son regard toujours novateur au sein de chacun des grands courants artistiques ayant marqué ce siècle. L'année 1901 est un tournant important dans la carrière artistique du célèbre peintre. Il passe la première partie de l'année en Espagne où il participe à la création de Arte Joven. Il s'agit d'une revue indépendante et d'avant-garde qui se donne pour objectif de présenter la nouvelle scène artistique. Puis, comme convenu l'année précédente, le jeune artiste de dix-neuf ans retourne à Paris afin d'organiser avec Ambroise Vol­lard, le plus grand marchand du début du XXe siècle, sa première exposition person­nelle. C'est un vrai succès commercial pour le jeune espagnol, encore inconnu : toutes les oeuvres alors présentées sont vendues, certes à des prix très attractifs, mais ven­dues. Les critiques y reconnaissent un réel talent et le soulignent mais regrettent un manque d'originalité dans la technique et le choix des sujets. En effet, Picasso peint soixante-quatre toiles en s'attachant à représenter des thématiques modernes très inspirées de la peinture des maitres de l'époque comme Van Gogh, Degas ou encore Toulouse-Lautrec, comme dans le Divan Japonais. C'est alors dans l'exaltation de ce début de renommée que Pablo Picasso apprend le suicide de son grand ami catalan Carlos Casagemas. Il est profondément choqué par cette tragédie et son oeuvre en est irrémédiablement marquée. L'artiste aborde dans sa peinture et ses dessins des thé­matiques mélancoliques et sombres qu'il met en valeur grâce à une palette de tons froids dominée par la couleur bleue. Durant ces quelques années, Picasso s'intéresse surtout aux représentations de la souf­france, de la solitude et de la pauvreté. Il dessine des mendiants, des aveugles, des saltimbanques ou encore des pros­tituées aux silhouettes faméliques et aux regards durs. Il s'émancipe de la génération d'artiste dont il s'inspirait en s'éloignant de la peinture de cabaret ou d'opéra, bruyante et mouvementée. Il se concentre alors sur sa volonté de représenter la profondeur de la nature humaine. Ces visages vides, perdus, émaciés sont une façon d'exprimer la douleur de la perte et la confrontation à la mort du jeune homme.